dimanche 11 décembre 2011

Première rencontre


Jan Rohlf, Untitled, from the series All the Guards Asleep


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Dragons forcenés au détour d’une nuit sans ailes, les brouillards agiles s’entorsent dans la tornade d’un climat de béton.
Dans le doute, d’incertains cendriers froids se remplissent, tout au long d’une patiente stance qui attend son fumeur.
Des rigoles dégoulinent les hululements des girls, qui piaulent, alarmant le chaland.
Le feulement des néons cuit les façades tendues de nuit qui t’accueillent, pluvieuses.
Fendant quelque foule anonyme et gainée de nylon tissé, de soie et de cuir, tu frôles des bêtes irrépressibles aux talons comme des poignards.
Leurs regards mouillés et dégoulinants font suer des rivières de charmes sur leurs joues rosées, mineures et camées.
Le chef dolent, le cil abaissé, tu masques tes examens, celant sous le professionnalisme, l’avidité.
Le cerbère oblique et black t’a détecté à la volée, et il te cède, en ennemi complaisant, la priorité réservée aux crevures.
Dès lors, les tafeurs de la nuit garderont par devers eux leur joie de vivre.
La déesse du vestiaire te payera d’une froide œillade ton assidu sourire glacé.
Les amas compacts qui s’entrechoquent dans les basses t’ignorent, et leur grâce chaloupée te fait vaciller.
Peu importe : les affaires reprennent.
Des murmures ourdis aux oreilles attentives, d’imperceptibles fixations, des protections engagées, des dettes contractées se succèdent. La routine.
Une espèce de contact programmé et sans intérêt retient seulement ton attention.
Une légère incursion dans un univers étrange et vide, celui du jour. Elle vient de là.
Tu lui jettes quelques sourires de contrefaçon pour te débarrasser de la fade personnification de ton ennui le plus rude.
Mais, curieux de nature, tu enquilles pour évaluer la résistance du spécimen.
Quelque chose se produit, dans cet échange stupide.
Des miroirs qui s’épanchent dans ses gestes, dans ses hésitations.
Des reflets qui se traînent aux contours de sa voix, de ses alcools.
Des résonances qui s’ancrent dans ses silences, dans sa vigilance souterraine.
Des instants fébriles reviennent à eux, à l’intérieur de tes souvenirs vitrifiés, amputés.
De tes dépendances, tu imagines une filière humaine, soustraite à toi, à ta trajectoire-limite.
Tu te prends au jeu de l’exploration adelphique, partielle et tentaculaire.
Tu écoutes.
Tu cherches les fondamentaux, ces pyramides bardées de barbelés qui t’éblouissent et qui te fournissent un prétexte pour rempiler.
Et tu les trouves.

La nuit s’érode et le palier salé du club se tranquillise, fané.
Tu ne comprends pas la stupeur qui luit à sa surface, quand tu évoques vos futurs probables.
Tu avais dû mal régler tes indifférences.

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