mercredi 9 septembre 2009

I hear thunder

Le vent souffle à l’intérieur des portes ouvertes et les éclairs remanient l’espace.

Dès qu'il apparut près de l’ascenseur, ils surent qu’ils n’étaient plus seuls. Ils ne trouvèrent rien à redire quand il descendit les éléments qui faisaient double emploi, sous leurs yeux, dans le déclic de ses armes. Il les remplacerait largement. Ils ne parlèrent pas beaucoup, seulement quelques mots techniques. Ils savaient à quoi s’en tenir avec lui et lui savait ce qu’ils valaient.

Ils s’étaient mutuellement observés pendant des mois, dans une sorte de laboratoire frénétique. Des immeubles s’envolaient de manière spectaculaire alors que des souterrains s’effondraient pour libérer des masses de billets qui finissaient régulièrement dans les rues bondées, aux heures de pointe. Aucun mur, aucun blindage pour lui résister. Les otages restaient silencieux, à l’abri dans des containers aux destinations improbables. Ils en tuaient parfois quelques uns, pour la forme. La panique générée par la menace constante qui pesait sur la ville leur fournissait l’énergie suffisante pour poursuivre et surmonter l’angoisse d’une mort violente ou, pire, d’une mise en cabane. Game over. Le jeu ne finirait qu’après l’anéantissement total de leurs forces ou de celles de l’ennemi qui prenait des formes variées mais toutes respectables.

Ils s’admiraient réciproquement. Ils enviaient sa capacité à travailler seul et à faire abstraction totale des risques. Ils admiraient sa maîtrise des explosifs, qui obéissaient à son désir de ravager cette ville de manière structurée. D’un hôpital, il ne laissait parfois debout que la salle des infirmières, avec les infirmières à l’intérieur, indemnes. D’un musée il pulvérisait les cloisons, laissant les œuvres intactes à la merci du soleil et du vent.



Il admirait leur capacité à se mouvoir comme un seul être, leur cohésion de meute, leur appartenance qui leur permettait de tout réussir, de maîtriser à fond leurs attaques impeccables. Comme du mercure : ils entraient partout. Multiformes : ils retournaient toutes les situations à leur avantage. Des cerveaux en relais, des corps qui se connaissent par cœur, des imaginations partagées. Des solutions à la pelle.

Une rencontre inévitable. Ils ne devaient pas se mesurer, seulement se compléter. A leurs regards, il sut qu’il ne ferait jamais partie du groupe. Il sut qu’il ne pourrait jamais être à leur tête. L'idée de chef leur était étrangère. Elle ne pouvait pas cadrer avec eux. Ces types ne donneraient jamais leur vie pour lui. Mais ils sauraient partager. La science et l’art.

La prudence n’était pas de mise dans leurs ambitions. Elle l’était dans la réussite, le but n’étant pas de ne pas se faire coffrer, mais de faire le maximum de dégâts, à leur manière et à leur manière seulement. Ce qu’ils avaient en commun, ils ne le relèveraient même pas. Leur objectif, ils n’en parleraient donc pas.

La ville disparut un jour. D’abord, la totalité des vitres de la cité volèrent en éclats. Puis il ne se passa plus rien pendant environ cinq secondes durant lesquelles les habitants restèrent figés, coincés dans l’attente de l’imminente déflagration. Les bâtiments commencèrent alors à se désagréger, un par un. De longs rubans de poussière silencieuse s’effondrèrent sur l’asphalte qui suait. Ils ne sentirent que les vibrations des charges qui s’exprimaient des dizaines de mètres en dessous du niveau des trottoirs, comme de légers tremblements de terre. Et le sol se déroba sous eux.

mardi 1 septembre 2009

tentative number one

La fille se promène dans l'espace confortable d'un attique. Elle erre plus qu'elle se dirige vers un lieu particulier. La lumière est claire, elle passe au travers des baies vitrées sans encombre. Les cheveux de la fille sont noués en chignon haut sur son crâne de manière à ce qu'on peut observer sa nuque. Elle ne sait pas trop ce qu'elle ressent. La seule chose qui est certaine, c'est que, pour la première fois de sa vie, elle n'aura pas peur de tirer.


Elle tient une arme dans ses mains, plus précisément un flingue automatique. Elle passe de pièce en pièce pour découvrir le meilleur endroit. Elle n'a pas peur. Le salon, c'est le bon endroit.


Sans trop se poser de questions elle se colle le flingue dans sa bouche et tire. Elle voit l'arrière de sa tête voler. Elle voit au travers de ce trou pendant un cour instant. Puis un vertige. Elle perd connaissance. Il lui semble qu'elle s'effondre sur le parquet.


Elle se réveille un peu plus tard avec la certitude de s'être ratée. Elle ne s'est pas trompée. Elle se relève en titubant un peu. Ratée mais touchée, tout de même. Comment a-t-elle pu? Elle croyait pourtant que cette technique était infaillible. Elle cherche un miroir. A l'arrière de son crâne elle contemple un orifice de dix centimètres de diamètres, très rouge, avec de la chair. Elle se demande quelle partie de son cerveau a été pulvérisée ainsi. Elle se dit qu'avec un trou pareil, elle devrait être morte.


Il y a des gens maintenant dans l'attique, de la famille, des amis. Certains se trouvent au salon, d'autres aux toilettes. Elle ne leur parle pas. Elle se demande si elle a perdu la faculté de parler. Si cette faculté se trouvait dans la partie de son cerveau qui a volé en éclats.


Elle s'assoit à la grande table en pin clair du salon. Elle scrute la peau de son bras gauche dont la texture varie. Elle explique à son voisin, qui semble être un ami proche, qu'elle devrait être morte. Il lui répond que ça peut toujours venir. En y regardant de plus près, elle se rend compte qu'elle peut observer les cellules de son bras comme si elles étaient grossies 10000 fois au microscope. Les cellules sont de forme plus ou moins hexagonale, gonflées de gel transparent, avec au centre un noyau coloré, bleu, rouge ou jaune, c'est selon. Elle sent que ces noyaux sont une anomalie. Alors elle presse les cellules pour les expulser mais n'y parvient pas. Ses amis autour de la table font des commentaires et des hypothèses sur sa mort éventuelle.


A un certain moment, son bras devient quasi transparent, elle est alors certaine qu'elle va mourir. Puis, peu à peu, sa peau retrouve son apparence naturelle, opaque et mat. A ce moment-là, elle sait qu'elle va vivre. Un sentiment d'échec l'envahit.


Un rêve, dernière nuit du mois d'août 2009